Malgré des études qui montrent qu’adhérer à un groupe de gestion agricole augmente le bénéfice net, la grande majorité des agriculteurs ne le font pas.
Selon Richard Boonstoppel, producteur de lait du Nouveau-Brunswick et président du Fredericton Dairy Management Group, la raison est fort simple.
« La plupart des agriculteurs ont de la difficulté à lâcher prise et à montrer leurs données financières », explique l’homme âgé de 46 ans qui exploite Scotch Lake Dairy, une ferme laitière de 50 vaches située à l’ouest de Fredericton.
« Pour ça, il faut se dévoiler : c’est un peu comme se présenter en sous-vêtements devant les autres. Ce n’est pas quelque chose avec laquelle les gens sont à l’aise. »
Pourtant, son groupe est la preuve que ce n’est pas un obstacle insurmontable.
« Le succès de notre groupe tient au fait que mes parents et les autres agriculteurs qui l’ont démarré dans les années 1980 ont commencé en se réunissant autour d’une table et en abordant divers aspects financiers sans toutefois ouvrir les registres », raconte M. Boonstoppel, qui s’est joint au groupe en 1996, lorsque lui et sa conjointe Carol se sont lancés en agriculture.
Au début, le groupe comptait sur l’aide de fonctionnaires provinciaux pour l’analyse comparative; maintenant, il compte sur Les Groupes conseils agricoles du Québec (qui fournissent des données de références provenant de leurs groupes conseils). Mais le point tournant s’est produit lorsque les membres se sont sentis suffisamment à l’aise pour dévoiler leurs chiffres.
« C’est à ce moment que le véritable apprentissage commence parce que vous êtes en mesure de voir ce qui se passe réellement et de poser des questions très spécifiques sur les façons de faire et le pourquoi. »
Cette ouverture a eu des répercussions directes immédiates. Des membres ont découvert que les primes d’assurance ou les taux d’intérêt qu’on leur demandait étaient plus élevés que ceux de fermes comparables. M. Boonstoppel a commencé à acheter des aliments en vrac pour ses génisses lorsqu’un autre membre a comparé les chiffres. À l’heure actuelle, chaque membre du groupe, qui se réunit tous les trois ou quatre mois, a amélioré son analyse comparative et sa rentabilité.
M. Boonstoppel estime que les connaissances qu’il a acquises grâce au groupe lui ont été très utiles au moment de prendre la plus importante décision de son métier : devenir le premier producteur de sa province à acquérir un système de traite robotisée.
En août 2009, Richard et Carol, qui revenaient de leurs vacances aux États-Unis, se sont arrêtés en Ontario au Canada’s Outdoor Farm Show (foire agricole en plein air) pour visiter le stand d’un concessionnaire Lely et jeter un coup d’œil aux systèmes de traite robotisée dont le coût dépasse les 200 000 $.
« Nous en avons parlé sur le chemin du retour, et je me souviens d’avoir dit : Je ne suis pas certain d’avoir le courage d’aller de l’avant, raconte M. Boonstoppel. Mais avec le temps, l’idée est devenue plus acceptable. En février, nous sommes retournés en Ontario pour visiter des fermes qui possédaient des robots de traite et en mai, nous avons signé les papiers. »
Avant d’acheter ce robot, nous avons effectué de nombreux calculs.
« La tête peut commencer à vous tourner, dit-il. Mais le plus important, c’est que nous avions des données. Nous savions quelle était notre situation par rapport aux moyennes observées dans l’industrie et nous avions une certaine marge de manœuvre financière pour passer à l’action. »
Il a aussi été capable de soumettre son plan à son « groupe de réflexion ».
« Certains avaient de l’appréhension et j’ai entendu beaucoup de commentaires du genre Es-tu certain? dit-il. Mais cette pensée critique est nécessaire. Certains sont avant-gardistes et s’ils faisaient toujours tout ce qu’ils souhaitent, ils pourraient facilement se retrouver dans une mauvaise posture. Vous avez besoin de gens qui vous posent des questions sur ce que vous faites. »
Être membre du groupe est plus utile maintenant qu’il ne l’était au début étant donné que, de nos jours, l’agriculture repose sur l’information et qu’il y a toujours quelque chose de nouveau à analyser, ajoute-t-il.
« Nous avons un groupe diversifié : les plus jeunes apportent des idées nouvelles et les plus âgés sont capables de parler de leur expérience et de poser les bonnes questions. »
Chaque agriculteur peut tirer profit du fait de faire partie d’un groupe de gestion; il suffit de commencer à petite échelle, de progresser lentement et d’avoir du plaisir, explique M. Boonstoppel. Bien que les points de mire soient les chiffres et l’analyse comparative, les discussions sont fructueuses, dit-il.
« Personne n’excelle dans tout; on peut toujours apprendre quelque chose des autres », conclut-il.
Gestion agricole du Canada et l’Institut de la gestion agricole ont élaboré un guide sur la façon de démarrer et de diriger un groupe de gestion agricole intitulé Farmers Working with Farmers: The Power of Groups (en anglais seulement). Vous le trouverez dans la section Ressources du site old.fmc-gac.com.
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